Le bâtiment Bibliothèque universitaire a été conçu par Édouard Albert dans les années 60 et réalisé par François Maroti. Il est basé sur l’idée d’une tour-magasins centrale de 16 étages autour de laquelle se déploient 4 bâtiments d’un étage reliés à la tour par un système de passerelles surplombant un patio.
Les grands plateaux libres permettent à un public de plus en plus nombreux de travailler sur des collections aujourd’hui majoritairement en libre accès.
La mutation de la pédagogie et des besoins des étudiants exige désormais que les bibliothèques universitaires se dotent d’espaces d’étude et de travail individuel et en petits groupes, mais également d’outils numériques de qualité, ce qui implique de faire évoluer le bâtiment.
Le projet du Pixel naît de ces deux constats.
L’agence Sogno Architecture, qui a remporté le concours du Pixel, a proposé un aménagement permettant de répondre à ces objectifs tout en respectant l’architecture d’Édouard Albert.
Nous avons interviewé Françoise Sogno et Alexandra Lehec pour échanger sur leur perception du bâtiment d’origine et sur leur projet architectural.
Les extraits issus de cet entretien sont restitués de manière fidèle.
Conserver l’architecture remarquable d’Édouard Albert
Pour les architectes en charge du projet, le bâtiment d’Édouard Albert, avec ses vastes salles de consultation, témoigne d’une réelle intelligence de l’espace et offre d’intéressantes possibilités d’aménagement.
« C’est exactement ce que l’on recherche [avec les] lofts. Ces grands espaces permettent d’aménager comme on le souhaite. [Le bâtiment d’Edouard Albert] avait été réfléchi pour être économiquement cohérent, […] et en même temps cette architecture des années 60 […] ne lésinait pas sur les volumes ».
Le bâtiment des bibliothèques de Nanterre a été labellisé Architecture contemporaine remarquable en 2018. Il s’agissait donc d’adapter le programme proposé tout en respectant l’architecture d’origine. Pour répondre à ces impératifs, les architectes ont imaginé un aménagement intérieur permettant de conserver l’identité du volume initial et ses dimensions exceptionnelles.
« La trame constructive avait été réfléchie […] pour dégager le maximum d’espace sans cloisonnement. Nous avons essayé de garder cela avec les bulles [de travail en groupe], en les organisant selon une composition qui permette de dégager les façades et de garder la lumière naturelle et la transparence ».
Une composition en forme de projet urbain
L’espace est pensé comme un projet urbain, un « paysage intérieur », se développant le long d’une artère principale, avec des espaces isolés et des espaces publics qui sont autant de « respirations ».
Les espaces isolés (les bulles) sont répartis le long de la circulation principale, dégageant les deux façades vitrées. Regroupées par deux ou trois, ces bulles dessinent par leur disposition des espaces ouverts (les salons) qui bénéficient des vastes dimensions de la salle. De hauteurs différentes, elles créent un vallonnement qui anime le grand volume.
« Tout notre travail dans toutes les bibliothèques […], y compris [les] médiathèques, [consiste] à transformer l’espace pour que les besoins fonctionnels définis par les bibliothécaires […] s’y matérialisent. Je pense que vous reconnaîtrez la grande salle parce que le volume existera toujours […]. Mais cela va complètement le modifier […], dans l’esprit des salles de co-working, des lofts, des nouvelles façons de travailler”.
Une attention portée à l’acoustique et à l’isolation thermique
“Les universités n’inventent pas de nouvelles façons de travailler. Je pense qu’elles suivent un processus qui est déjà mis en place par le monde du travail et par les grandes entreprises. Nous sommes en train de faire évoluer les choses vers cela, c’est-à-dire de créer des petits espaces où l’on peut se regrouper, travailler ensemble, mais en même temps en étant un peu isolé acoustiquement. L’acoustique est très importante ».
Quarante-cinq ans après, la conception technique du bâtiment d’Édouard Albert, audacieuse pour l’époque, s’essouffle et démontre ses limites par rapport aux nouveaux usages des espaces : le bruit résonne dans les vastes plateaux et les façades mal isolées ne garantissent pas un confort suffisant aux usagers. Un important travail d’isolation thermique et acoustique a été effectué par Sogno Architecture.
« Nous avons tout fait au niveau des grands espaces [pour limiter le bruit], avec de la moquette au sol, un plafond acoustique, les trumeaux qui renferment de l’isolant acoustique et thermique, et les boîtes […]. Théoriquement, ce qui se passe dans une boîte, ne doit pas être entendu de l’extérieur. On a une perception de l’espace, non pas que visuelle, mais aussi sonore ».
Un espace entièrement connecté
Le projet architectural astucieux de Sogno Architecture permet de créer de multiples espaces, ouverts ou fermés, tous connectés entre eux à l’intérieur du grand volume. Le dos des bulles permet d’installer des tables filantes et de dessiner les petits salons.
Connexions physiques, spatiales, mais aussi numériques. Ce dernier aspect est un élément central du projet. L’intégration d’interfaces numériques et de connectiques constituait donc une partie importante du programme du Pixel.
“Tout est connecté. […] Puisque c’est un espace où il n’y a pas de collections, […] tout est dédié au numérique. On peut se brancher quasiment partout”.
Tables tactiles et écrans ont été pleinement intégrés aux différents espaces du Pixel.
Le projet architectural imaginé par Sogno Architecture répond aux besoins actuels des étudiants, comme celui d’Édouard Albert répondait aux exigences de son époque. Les étudiants trouveront dans le Pixel des espaces et des matériels adaptés à leurs usages actuels. Mais il s’agit également de leur proposer un lieu chaleureux et convivial.